Education à la Santé

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Education à la prévention HIV-SIDA,
l’expérience et les recherches du LDES

André Giordan

 

Au cours des 20 dernières années, l’Education à la prévention HIV-SIDA a pris des formes très diverses. Ce sont des campagnes de sensibilisation à la prévention des risques, des actions de surveillance et de contrôle des maladies. Elles peuvent cibler les spécialistes pour partager rapidement les informations sur les progrès et les problèmes relatifs au contrôle de l’épidémie. Elles peuvent s’adresser spécialement aux élèves, aux étudiants ou encore au grand public. Radio, cinéma, télévision, campagnes de communication sont alors mises à contribution.
A la lumière de ces expériences, plusieurs aspects demandent d’être travaillés spécifiquement. En premier, il s’agit de discuter ce qu’est une éducation à la prévention dans la cadre d’une politique de santé. En second, il s’agit de repenser les stratégies éducatives. Plusieurs évaluations entreprises mettent en évidence le peu d’impacts des actions de communication ou des activités ponctuelles de sensibilisation.

Particularités de l’Education à la santé

L'Education pour la Santé présente des particularités qui la différencient aussi bien des programmes scolaires habituels que des activités de soin. Par rapport à l'école, la santé n'est pas un savoir comme les autres ; en effet, il n'est pas banal qu'on enseigne aux élèves quelque chose qui touche à leur personne, à leur intimité, ou à des tabous sociaux comme la sexualité ou la mort. Elle fait de plus en plus appel à des approches interdisciplinaires en relation avec une éducation à l’environnement ou à la citoyenneté.
Pour un professionnel de la santé (médecins, infirmiers,..), il est inhabituel de focaliser son attention sur la santé de façon positive et d'avoir pour interlocuteur un public valide. La relation éducative se distingue de la relation d'aide pour laquelle il est formé, les prescriptions font place au dialogue.
Les savoirs de santé ne sont pas seulement médicaux. Plusieurs dimensions, environnementales et sociales entre autres, sont à intégrer. En institutionnalisant strictement la seule prudence, on s'offre les apparences d'une fausse sécurité, tout en s'interdisant un changement potentiel.
Les savoirs de santé ne sont pas non plus uniquement cognitifs. Ce sont d’abord des attitudes, des compétences relationnelles qui vont jusqu'à la capacité de prendre des initiatives concrètes et de gérer des situations: le savoir-agir. L'explicitation des aspects relationnels peut entraîner des remises en cause de certaines habitudes ou traditions de l'école ou de la famille. Une éducation à la santé ne peut éluder ces questions.


Quelles stratégies éducatives optimales ?

L’éducation à la prévention HIV-SIDA devient une urgente nécessité dans les hôpitaux, les instituts de prévention, mais pas seulement. C’est un challenge pour une société en mutation. Pourtant, l’évaluation de campagnes récentes met en évidence beaucoup de naïveté dans les tentatives passées. Le modèle “pédagogique” envisagé est le plus souvent de type frontal : on pense qu’il suffit de dire et de montrer pour que le message “passe”. 
En matière d’Education à la santé, il ne suffit pas de savoir, il nous faut encore mobiliser ce savoir. Ce qui n’a rien d’évident. Certains croient toujours qu’on peut régler le problème par de la « pub » - on constate très bien le peu d'impact des campagne de prévention envers les jeunes- ou l’envisage comme une question de simple transfert.
Les obstacles sont partout. Ils sont aussi bien affectif, que cognitif ou métacognitifs. Les seules stratégies efficaces sont multiples et systémiques. Seule la combinaison d’éléments moteurs issus de la biologie –la connaissance de l’infection-, de la psycho –les comportement sexuels habituels-, de la psycha -l’image de soi-, de la sociologie -les personnes repères, artistes, mannequins,..- ou de l’anthropologie -mon comportement avec les autres- ont quelques chances de succès.

Mêmes les méthodes actives ou constructivistes montrent de grandes limites, notamment chez les personnels soignants. Les conceptions du public (ou des professionnels) visés, en d’autres termes leurs pratiques habituelles, leurs évidences ou leurs modes de raisonnement, sont autant de facteurs limitants pour comprendre le message ou le mettre en application.

Prévenir, c’est autant déconstruire une façon de penser (ou de travailler) qu’en construire une autre, c’est autant décablé sa pensée que recablé ses neurones autrement. La mise en oeuvre d’une Education à la Santé heurte le fonctionnement habituel : pour exercer la communication, les élèves sont donc encouragés à se parler, ils élaborent en petits groupes les savoirs de leur propre vie, ils peuvent apprendre des choses différentes, en fonction de leurs particularités biologiques et sociales, de leur sensibilité: il n'y a plus de juste ou de faux! L'adoption de comportements « sains » passe par la discussion en groupes qui favorise la prise de conscience des motivations, met en évidence la diversité des aspects à prendre en considération et anticipe des choix de modes de vie.
Rien n’est direct ou automatique. Seul l’apprenant (public ou professionnel) peut apprendre. Toutefois il ne le peut que s’il interagit avec un environnement didactique complexe, systémique, souvent paradoxal, qui l’incite à transformer sa pensée et... à mobiliser cette dernière.

Environnement didactique :
paramètres à prendre en compte pour faire apprendre de la prévention